La première étape du Mare i Monte, de Calenzana à Bonifatu, est assez dure. Non pas qu’il faille une condition physique particulière pour la passer mais, sur ce tronçon, le manque d’ombre et les températures élevées peuvent décourager. Heureusement, l’étape est assez courte et une belle récompense attend les randonneurs en fin de journée : une baignade dans les vasques de la Figarella et une vue 

imprenable sur le cirque de Bonifatu, une des petites merveilles de la montagne corse. 

Si vous vous apprêtez à randonner sur le Mare i Monte, vous trouverez dans cet article le profil de l’étape, la trace GPX téléchargeable ainsi que mes adresses pour dormir et manger sur le sentier. 

Calenzana - Bonifatu : profil de l'étape 1

Jour 1 : Calenzana – Bonifatu 

  • Kilométrage : 11,8 km 
  • Temps de marche : 5h 00
  • Dénivelé : +563 m / – 331 m 

 

Départ avant 8h de Calenzana obligatoire en saison : le sentier est fermé de 11h à 22h du 1er juin au 30 septembre par arrêté municipal pour risques d’incendie. En conséquence, les départs de Calenzana doivent impérativement se faire avant 8h  afin d’éviter que les gardes forestiers vous obligent à faire demi-tour. Ils patrouillent tous les jours.  

Download file: Mare i Monte. Etape 1. Calenzana - Bonifatu.GPX

Calenzana - Bonifatu : le récit de la première étape du Mare i Monte

D’aussi loin que je me souvienne la Corse, ce gros caillou, est un entrelacs de maisons de famille, de routes sinueuses empruntées par une vieille Citroën bleue délavée dont les cousins – plus âgés – doivent s’extraire à chaque montée pour aider l’embrayage fatigué que ma grand-mère ne quitte jamais du pied. 

D’été en été, les rituels – quasi religieux – se sont installés. Juillet est réservé au Golo, la rivière entonnoir, et à Cap Sud, là où la température de l’eau permet encore quelques rafraîchissements. Août, quant à lui, nous ramène vers le Cap Corse, l’Ostriconi et souvent les longues tablées en famille à Ghisonaccio célèbrent les premiers orages. 

Il est rare que l’on connaisse sa région tant les familles, sans le vouloir, enferment. Cette année, par un choix conscient, j’ai débarqué à Bastia un 24 août, un dernier week-end de saison. Au rond-point de Borgo, j’ai bifurqué à droite vers Calvi et j’ai poussé jusqu’au village de Calenzana. Derrière ce hameau, qui n’en est plus un, un rêve de gamine : m’enfuir, prendre le maquis et découvrir la mesure de la Corse en solitaire. Confronter très égoïstement cette île que je connais si bien avec ses paysages intérieurs, tout ce qui d’elle m’a échappé jusqu’alors. 

Plage de l'Ostriconi

Alors que je quitte l’Ostriconi par la route de la côte, ma mère me jette un regard par le rétroviseur. “Chaque arrivée, pour toi, ressemble à un départ”. Il n’y a plus, depuis longtemps entre nous, de reproches sur ma manière de vivre même si celle-ci l’étonne toujours, elle qui a choisi depuis plusieurs années d’en revenir à ses racines et d’emprunter la voie d’une vie sédentaire. Je bredouille, m’explique, essaye de trouver un terrain qu’elle pourrait entendre mais à la vérité, je ne m’explique plus les raisons de mes voyages. J’aimerais lui dire, avec autant de charme et d’aplomb, ce que Bouvier a écrit mais l’Usage du monde est inaccessible, au fond de mon sac tassé. 

” C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent…Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûre de soi, on s’en va pour de bon.”

L’usage du monde, Nicolas Bouvier

Calenzana. 8h30. 

Entre les façades défraichies – l’héritage et l’indivision semblent, à toute époque, être les véritables fléaux corses – un sentier lézarde, tronçon commun de deux grandes randonnées corses : le fameux GR20 que l’on ne présente plus et qui, selon la légende, se voudrait le sentier le plus difficile d’Europe, et le Tra Mare i Monte, sentier de la transhumance des bergers du Niolu qui relie Calenzana à Carghèse en 10 jours et quelques 150 kilomètres. C’est vers le second, bien moins fréquenté, que je me tourne cette fois. 

facade maison de calenzana corse

Accessible aux bons randonneurs sans être aussi technique que le GR20, il longe trois sites majeurs du patrimoine corse ; la réserve marine de Scandola, le petit village de Girolata et les gorges de Spelunca

Le coffre de la voiture claque. Ma mère me prodigue les derniers conseils avant de reprendre le volant. Ici, pas de baisers tendres mais un couteau, des fromages et de la charcuterie que l’on glisse en douce dans un sac avant de partir en guise de gestes d’amour. Terre pauvre et agricole oblige, nos attentions sont avant tout comestibles. 

La brume, encore légère en cette fin de mois d’août, adoucit les pics rocheux qui se dessinent devant moi. Je pars. C’est drôle comme chaque début de longue randonnée me font le même effet. S’alourdir d’un fardeau pour en déposer un autre, intangible, et se hâter les premiers pas, comme si j’allais après quelque chose, le plus vite possible, oubliant d’abord que la vitesse en montagne n’est pas un sujet et qu’il n’y a rien à rattraper sinon le sentiment, enfin, d’être librement soi

Dans la première montée, qui aura duré une heure, je n’aurais croisé que deux couples et un randonneur à la journée, bien loin de ce que l’on peut imaginer de la foule des sentiers corses en saison. 

Des papillons par dizaine, à chaque bosquet, s’emploient à fleurir le maquis entre fougères, sauges sauvages et arbustes piquants. Au loin, un cirque de roches blanches s’érige, un Chalten bas qui appelle à d’autres cimes plus exotiques. Goûlument, comme une enfant, les mains tâchées, j’attrape quelques mûres à la volée pour conjurer la soif et la fatigue d’un corps encore lourd. 

Au loin, la chasse se rappelle à moi par les premiers tirs de la saison. C’est lorsque les peaux des sangliers sèchent sur les clôtures du Nebbio que l’on devine le plus la prégnance de la chasse sur le territoire. De ce monde d’hommes que les femmes n’entrevoient presque jamais, on devine un esprit de corps, un lieu de passation de la tradition et de la langue corse et un apprentissage, très jeune, du maquis. Les fusils ne sont pas très loin. A chaque rafale, l’odeur de la poudre m’arrive comme une flagrances de plus naissant du maquis. Si les busards ne volaient pas si bas, on pourrait croire à un simple tonnerre qui s’annonce. 

Quand je quitte le sentier pour une route forestière, le soleil déjà haut fait éclater les couleurs du golfe de Galéria. D’un coup, un vent fort, le Maestrale qui nous vient de Marseille, s’est levé et rappelle aux imprudents qui empruntent le sentier aux heures interdites que le réel danger ici, bien plus que la chasse et les sangliers, vient du feu.  La patrouille tourne sur la route forestière où, tout, épaules comme bosquets sont exposés aux températures ardentes de cette fin d’été. Qu’importe. J’avance, m’abandonnant aux odeurs de mon enfance et aux chants des grillons, symphonie allegretto qui accélère mon pas. 

Voilà quatre heures que je marche quand, au loin, le frappement de l’eau de la Figarella parmi les roches laisse espérer une pause clémente. Enfin, un pont et l’ombre d’une forêt plus dense, la Sambucca, m’offre le répit de l’ombre.  

Entre les vasques, l’eau compose un drôle de décor. A sa surface, surnagent quelques araignées d’eau qui, de leurs ombres, dessinent sur les pierres plates des fonds des vaisseaux spatiaux. La marche n’a pas encore révélé son principal bienfait : me permettre d’accéder à l’autre rythme, celui où les pensées s’arrêtent de temps à autre pour laisser place à la contemplation libre. D’une pierre à l’autre, je suis les araignées, de l’eau jusqu’à la taille, comme une enfant court après les margouillas. Petit à petit, le sang repart, les tendons se délient. 

Je lis Bouvier, d’une vasque à l’autre, où Anatalie et Corse se répondent, comme un doux retour aux sources que seule une fin d’été permet.  

14h.  Je me décide à reprendre la marche. Les pins disparaissent à mesure que j’avance pour laisser place à des avancées de roches d’un rose passé qui lèchent le goudron. L’autre danger corse. Ici, les randonneurs sont légions puisque se croisent les sentiers à la journée des cirques de Bonifatu et les longs chemins venant du nord. Pourtant, sur cette route en lacet, aucun bas côté. Les conducteurs les plus attentionnés klaxonnent à chaque virage, les autres, plus habitués, roulent à bonne allure, fenêtres ouvertes. En équilibre sur le parapet, j’avance sans grand confort le long de cette route qui semble à tout égard – largeur et isolement – encore ne servir qu’au passage des ânes quand deux voitures qui se font face pile net. Retour en première. Pour quelques kilomètres au moins, ils auront appris la leçon. 

Enfin, alors que chaque pas résonne dans ma tête sur ce béton chaud, je quitte la route pour l’auberge de Bonifatu, située sur un petit chemin en contrebas. Là, en terrasse, je me plie au rituel qui berçait mes étés corses lorsque j’étais enfant : tirer une chaise de café et écouter les conversations alentour devant une bouteille d’eau d’Orezza, cette eau férigineuse de la Castagniccia, et de grenadine. 

A l’abri des pins, je monte la tente tant bien que mal en espérant la fraîcheur d’une soirée en altitude (600 mètres). En guise de dîner, quelques tranches de saucisson, un morceau de fromage et une pomme, le panier de ma mère. Un oiseau bizarre, une sorte de pigeon des forêts qui revêt un gris de cathédrale et, pour l’orgueil, quelques plumes oranges, partage mon sandwich en poussant des piaillements aigus de contentement. 

Demain, j’imagine, le Mare i Monte débutera vraiment, avec ses denivelés, sa chaleur et ses courbatures mais pour le moment, je savoure l’idée de retrouver mon île avec lenteur. 

Calenzana - Bonifatu : Où dormir ?

gite de l'auberge de la foret Bonifatu corse mare i monte

A Bonifatu, se trouve la charmante petite Auberge de la forêt. Au milieu des pins et dans le décor du cirque, vous pourrez choisir entre bivouac (9€ par tente) ou gîte (20€ en dortoir). 

Le personnel est super sympa et arrangeant et le gîte et les sanitaires sont propres. Pour ma part, j’ai opté pour le bivouac et les emplacements sont à l’ombre et comprennent une petite table pour pique-niquer. 

Adresse : Forêt de Bonifatu, 20214 Calenzana

Tél : 04 95 65 09 98

Ouvert du 1er avril au 30 septembre

Calenzana - Bonifatu : où manger ?

Le midi, prévoyez votre propre pique-nique et suffisamment d’eau pour la journée car il n’y a rien pour se ravitailler sur la route. 

Le soir, vous pourrez dîner à l’Auberge de la forêt qui propose des demi-pensions soir et petit déjeuner : 

  • demi-pension et bivouac : 32€
  • demi-pension et gîte : 43€
  • Petit-déjeuner seul : 7€
 
Possibilité de ravitaillement dans la petite épicerie de l’auberge et pique-nique du lendemain sur demande. 
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Mare i Monte Corse

Mare i Monte, le guide complet

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